
J’ai bien un daily fiable, plutôt simple mais confortable, qui roule correctement avec tout le nécessaire pour passer un bon trajet: clim, toit ouvrant, chauffage, vitres électriques, moteur diesel 1.4 du genre qui consomme un dé à coudre et demi. Mais pour une raison que j’ignore encore, quand il s’agit de partir vadrouiller sur la côte atlantique l’été, c’est très souvent l’Ami 6 que je choisis.
Pourtant, elle a tout pour m’en dissuader. Déjà, ça se traîne épais. Etonnant vu de ce que le double-corps engloutis, on est quand même proche des 7,5l/100kms. Ensuite, le confort est proche du néant : maintien dorsal inexistant, pédale d’accélérateur trop haute, chauffage aléatoire, suspensions Citroën pour le meilleur et pour le pire, le tout garantissant crampes aux mollets, lumbago, et nausées à l’arrivée. En plus, faut avouer que niveau ligne, on est loin d’une Facel Vega…
Remise dans son contexte, c’est vrai que cette bagnole est vilaine. C’était la quintessence de la voiture du pauvre à sa sortie. La Dacia Logan break des sixties. Parmi les rares modèles que les petits portefeuilles comme celui de mon grand-père pouvaient se payer à l’époque, on y vient… Cette voiture, c’est exactement le même exemplaire que celle que mon grand père s’est payée neuf cinquante ans en arrière. Dans sa livrée “Vert poubelle municipale, intérieur orange qui pique les yeux”. Quand je pense que mes grands-parents sont partis en vacances en Italie depuis Toulouse, traversant les Alpes à 5 dans ce cercueil…

Mais qu’est-ce que je l’aime cette bagnole ! Je l’ai plus ou moins ignorée depuis qu’elle nous a été offerte par un ancien collègue de mon père en 2007. Et cela jusqu’à janvier 2018 lorsque l’on a entrepris sa remise en route. Batterie neuve, 4 pneus neufs, couverture des sièges, réfection du moteur et ça dégage. Pas le temps de niaiser, la carrosserie restera cabossée, rayée, rouillée, les jantes resteront piquées. Cette voiture est globalement restée dans son jus et c’est comme ça qu’on les aime.
Bref, à peine le temps de constater la fin des travaux que j’ai déjà mon idée en tête : partir en vacances comme papy avec l’ami 6. C’est ce qui deviendra finalement mon rituel annuel. Lot, Gers, Landes, Pays Basque, le quatuor gagnant pour faire son meilleur road trip d’été en Ami. Et surtout parce que c’est tout plat.
Si l’on met de côté le mépris dont j’ai fait étalage un peu plus haut, on arrive facilement à s’attacher à cette voiture, à s’adapter et à prendre un certain plaisir de conduite. D’abord parce qu’elle est atypique. Pas belle, ATYPIQUE. Ensuite c’est vrai qu’elle a tendance à attirer la sympathie des plus de soixante ans, car beaucoup l’ont connue comme étant la voiture familiale de leur enfance. Et pour les quelques petits défauts ça va… La pédale d’accélérateur trop haute? Une cale en bois sous le pied et c’est bon. Les suspensions Citroën qui ont tendance à faire vomir les non habitués? On se rend compte que c’est bien confort lorsqu’elles engloutissent chaque ralentisseur comme si c’était un carré de mousse posé sur la route ! En revanche je cherche encore une parade pour éviter le lumbago après 2h de route. Mais c’est pas grave, si cet engin ne remonte pas le temps (quoi-que) il le ralentit largement et fait défiler le paysage des départementales du Sud-Ouest moins vite.
On prend le temps, on profite, on s’arrête pour faire deux trois photos, on prie pour ne pas tomber en panne, et la vie n’est pas si mal finalement.